Journée technique – « Intégration des Biosolutions dans la filière élevage pour une gestion durable et résiliente »

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Le 30 avril 2024 au pôle de Lanaud, QG de la race Limousine reconnu internationalement, les adhérents Agri Sud-Ouest Innovation se sont retrouvés autour d’une journée technique sur les Biosolutions en filière animale. 


La matinée a permis de faire un point réglementaire sur ce qui est considéré aujourd’hui comme étant un médicament vétérinaire, et les solutions existantes pour diminuer leur utilisation. Suite à ces interventions, le groupe de travail du cluster BiosolutioNA s’est réuni pour tenter de proposer une clarification de la définition du terme « biosolutions » en filière animale (terme transposé de la filière végétale mais non utilisé en filière animale). L’objectif étant de se placer en pionnier dans ce domaine. 

Idées clés :

Entre 2011 et 2022, l’utilisation d’antibiotiques en élevage a diminué de 52%. Le Plan Ecoantibio3 (2023-2028) vise à poursuivre cette réduction et à étendre ses efforts aux antimicrobiens et antiparasitaires dans une approche One Health. Ce plan inclut des actions en prévention, formation, recherche et surveillance, avec une attention particulière à l’évaluation de la phytothérapie et de l’aromathérapie. Par ailleurs, des modifications épigénétiques influencent la résistance des animaux aux maladies, et diverses approches, comme la gestion intégrée des troubles respiratoires des jeunes bovins, montrent l’importance des solutions multiples et personnalisées.

Mots clés : plan écoantibio, réglementation, biosécurité, épigénétique, gestion intégrée, antibiorésistance, aromathérapie, fiches cliniques


(Faiza LALICHE – Correspondante régionale pharmacie vétérinaire et alimentation animale, DRAAF Nouvelle Aquitaine) 

Entre 2011 et 2022, l’exposition aux antibiotiques a été réduite de 52%. Le nouveau Plan Ecoantibio3 (2023-2028) a été revu dans le but de continuer de réduire l’utilisation d’antibiotiques chez les animaux de rentes, mais aussi les animaux de compagnie pour qui les efforts restent moins marqués. 

Pour la première fois ce plan s’ouvre également à la diminution des antimicrobiens et antiparasitaires et a vocation à porter les sujets autour du concept One Health. Plusieurs axes d’actions ont été définis : prévention, formation, recherche (notamment via l’action 22) et surveillance. 

Ce qu’il faut retenir du Plan Ecoantibio 3 : 

  • Beaucoup de projets de recherche sont financés actuellement par le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire autour de l’antibiorésistance (116 depuis 2023)
  • Un nouveau règlement du médicament vétérinaire va introduire la notion « d’antimicrobien » ce qui permettra d’ouvrir le champ des possibles concernant les solutions alternatives pouvant faire l’objet d’évaluation par l’ANMV[1]
  • L’action 22 du Plan Ecoantibio, pilotée par l’ANMV, a pour objectif de recenser les pratiques et modalités d’usage de la phytothérapie et de l’aromathérapie pour les animaux de rente les chevaux et les animaux de compagnie. L’idée étant d’évaluer un maximum de produits/méthodes alternatives aux médicaments vétérinaires. Le contact clé sur cette action est Sophie Barreteau (sophie.barreteau@anses.fr). 

Que dit la réglementation aujourd’hui ? 

Certaines préparations de médecine complémentaires sont d’ores et déjà reconnues comme thérapeutiques (huiles essentielles (HE) et préparations à base de plantes). Deux d’entre elles ont fait l’objet d’autorisation de mise sur le marché (2) et ne sont donc pas soumises à ordonnance. 

Pour les autres, le vétérinaire est seul prescripteur. Pour être prescrites aux animaux de rente, ces substances doivent avoir fait l’objet d’une demande de LMR (Limite maximale de Résidus*) et être inscrites au tableau 1 des LMR. Seulement 120 substances végétales (dont 19 HE) y sont listées sur 300 plantes utilisées couramment.

A cette date une grande majorité des plantes, préparations de plantes, et huiles essentielles fréquemment utilisées en médecine n’ont pas fait l’objet de l’évaluation prévue par la réglementation LMR et ne peuvent donc pas être utilisée à des fins thérapeutiques car ne sont pas considérées à ce jour comme médicament vétérinaire. 

Il reste possible d’utiliser ces préparations à titre de l’alimentation animale mais aucun effet préventif ou curatif à l’égard des pathologies animales ne doit être revendiqué ET la préparation doit être distribuée via l’alimentation de l’animal. Ces préparations sont répertoriées selon 3 grandes classes :

  • Matière Premières (règlement 68/2013)
  • Additifs réglementés par une liste positive intégrée au règlement 1831/2003
  • Aliments complémentaires (règlement 767/2009)

Les opérateurs sont tenus pour responsables des autorisations, sécurité des aliments, allégations etc… 

*Les dossiers LMR permette de classer une substance pharmacologiquement active selon sa toxicité pour l’animal, l’utilisateur, l’environnement et le consommateur.

Pour en savoir plus retrouvez l’intégralité de la présentation ici.

Contact : faiza.laliche@agriculture.gouv.fr


(Jean-Luc Guerin – directeur UMR IHAP – ENVT / INRAE)

La biosécurité en élevage de volailles a été présentée comme étant un levier permettant de prévenir les maladies d’élevage et donc la réduction d’utilisation de médicaments vétérinaires, tout comme la surveillance évènementielle et programmée, et la vaccination.

Cette pratique est d’autant plus plébiscitée dans les élevages de plein air où il existe une forte perméabilité entre zones d’élevage et entre animaux d’élevage et faune sauvage.

La biosécurité divise les éleveurs qui connaissent des divergences fortes selon leur modèle économique. Le projet porté par l’ENVT visait à catégoriser ces profils psycho-sociaux (connaissances, attitudes, démographie, traits de personnalité) pour comprendre leur niveau d’acceptabilité des pratiques de biosécurité et le parcours pédagogique à mettre en place en fonction. 3 profils sont ressortis de l’étude : 

  • Ceux qui ne connaissent rien et ne veulent rien suivre
    • Ceux qui sont stressés et veulent bien faire
    • Les bons élèves avec des niveaux de formation élevés

En fonction de ces profils il convient d’adopter des postures de recommandations différentes. Par exemple, pour les moins sensibilisés il existe des méthodes de contrôle visuel telles que des poudres fluorescentes. Il est important également de s’entourer d’acteurs différents selon les profils (techniciens, vétérinaires, autres intervenants…)

La gestion de la biosécurité dans les élevages avicoles et palmipèdes doit être réfléchie à l’échelle territorialeégalement, certains endroits étant plus à risque que d’autres selon l’environnement, les élevages avoisinants ou encore le déploiement des circuits courts. En effet, certaines communes sont plus à risque (ZRD : zones à risque de diffusion). 

Pour en savoir plus retrouvez l’intégralité de la présentation ici

Contact : jean-luc.guerin@envt.fr


(Frédérique PITEL – UMR GenPhySE – INRAE / ENVT / INP-ENSAT)

Certaines modifications réversibles sur l’ADN permettent d’activer ou de désactiver l’expression de gènes du génome et de conférer à l’individu porteur des caractères différents pendant sa vie. C’est par exemple le cas des protéines d’histones qui viennent s’enrouler sur l’ADN. Ces modifications peuvent être héréditaires et se transmettre à la descendance mais restent constamment réversibles. 

Beaucoup de travaux de l’UMR GenPhySE ont mis en avant la faculté des modifications épigénétiques à favoriser ou défavoriser certains phénotypes et notamment la capacité de l’individu à résister à des stress thermiques générateurs de maladies. 

L’alimentation et l’environnement influent donc directement sur la capacité de résistance aux maladies des animaux d’élevage avec des transmissions sur plusieurs générations. Ci-dessous, quelques résultats de projets qui pourraient impacter rapidement nos systèmes d’élevage : 

  • La Génistine, isoflavone connue dans le soja permettrait d’augmenter le métabolisme des lipides et ainsi d’augmenter la production d’œufs, les performances de croissance chez les poulets de chair.
  • Des œufs couvés à température plus élevée permettrait aux animaux une fois adultes d’être plus résistants aux vagues de chaleur 
  • Le transport prénatal bovin pourrait modifier l’épigénome du veau ce qui pourrait devenir un élément de traçabilité performant
  • L’infection à une maladie modifie le profil épigénétique des cellules du système immunitaire et pourrait permettre des diagnostics plus précoces de maladies
  • L’antibiorésistance pourrait notamment être due à une adaptation épigénétique des pathogènes 

Des programmes de recherches sont en cours notamment GEroNIMo pour déterminer si les marqueurs épigénétiques devraient de ce fait être introduit dans les programmes de sélection génétique. 

Pour en savoir plus retrouvez l’intégralité de la présentation ici.

Contact : frederique.pitel@inrae.fr


(IDELE – Elise VANBERGUE)

Les troubles respiratoires des jeunes bovins en atelier d’engraissement touchent entre 20 et 80% des animaux selon les ateliers. L’IDELE s’est intéressé à des solutions pouvant prévenir ce risque. 

Des phéromones d’apaisement diffusées au niveau de la zone d’alimentation ainsi que des huiles essentielles n’ont eu que peu d’efficacité. 

Le projet a montré l’importance d’une gestion intégrée faisant intervenir diverses solutions alternatives : notamment l’association des préparations alimentaires (vitamines et Oligoéléments), à un sevrage précoce, une habituation au bâtiment et une vaccination ont permis d’obtenir de meilleurs résultats.

Toutes les méthodes alternatives qui contribuent à réduire le taux d’animaux infectés ont été classées selon 2 variables : l’efficacité et la facilité de mise en œuvre : 

Pour en savoir plus retrouvez l’intégralité de la présentation ici.

Contact : Elise.Vanbergue@idele.fr


Sophie Jouffroy – UMR IHAP – ENVT / INRAE

Le projet Antherin, s’intéresse à la résistance à l’éprinomectine (antibiotique) développée par les strongles, un parasite important dans les pâturages.

Afin de gérer ce risque et de diminuer les risques d’infection des brebis au strongle, il est important de revisiter la gestion du parasitisme dans son ensemble et d’agir sur tout le cycle de vie du parasite : résistance de l’animal ciblé par l’infection, la source de contamination, l’élimination du parasite.  

Le projet Phénopasto (sélection génétique de caractères de résistance au parasitisme et de l’adaptation au changement climatique en pâture, financement SADEA France 2030, accompagnement et labellisation par le pôle Agri sud-Ouest Innovation) propose la sélection des animaux connus pour avoir des phénotypes plus résistants à ce pathogène. Afin de limiter l’infestation, le projet ACCOMPLIR propose une gestion du pâturage différente : pâturage mixte ou alterné entre petits et gros ruminants avec des pas de temps qu’il reste à questionner.

Enfin en cas de besoin, le traitement par antibiotique doit se faire de manière ciblée et sélective : d’abord les animaux jeunes en priorité, puis les sensibles et les brebis en mauvais état corporel par voie injectable de préférence (voie orale à proscrire car peu de rémanence au-dessus du seuil d’efficacité). En conclusion, il existe des solutions multiples imparfaites, des combinaisons donc une approche de personnalisation qui nécessite conseil et formations.

Contact : sophie.jouffroy@envt.fr


Lors de la table ronde les acteurs de la filière ont mis sur la table les freins et les leviers au déploiement des biosolutions dans la filière élevage. 

  • Fanny ROCHON, Responsable R&I Nutrition Systèmes d’Elevage Maïsadour – Utilisatrice
  • Sophie Barreteau chargée du département évaluation scientifique, ANSES – Réglementaire
  • Bruno Jactel, Vétérinaire et fondateur Pertinent éco solutions – Producteurs
  • Xavier Banse, docteur vétérinaire Groupe Anibio – Prescripteur
Freins identifiésLeviers identifiés
Manque de capitalisation sur l’efficacité des produits proposés au commerce
Beaucoup de propositions mais peu de preuves d’efficacité 
Reconnaître les « bonnes » et les « mauvaises » biosolutions
Réglementation complexe et temps de latence des autorisations de mises sur le marché trop important pour innover rapidement 
Manque de communication entre acteurs de la filière
Capitalisation des données d’efficacité, d’innocuité et d’utilisation pour mise en commun et diffusion sur le terrain
Organisation en réseau
Ecriture de fiches cliniques encadrées par l’ANMV
Allègement des procédures réglementaires à l’échelle nationale et européenne
Davantage de collaborations recherche – producteur – utilisateur
Formation les utilisateurs finaux la qualité des produits, et aux risques associésEngagement des filières complètes

Contact :


[1] Agence Nationale du Médicament Vétérinaire

[2] Epigénétique : marques qui permettent à des cellules d’un même génome de s’exprimer en différentes cellules. 

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